XXVII J’ai un nom
Quelques jours plus tard, il y avait une soirée pour fêter la fin du trimestre. Ce qui nous a obligées, Lola et moi, à aller faire les boutiques.
Dans le premier magasin où nous avons tenté notre chance, ma copine a attrapé une robe rose bonbon avec des petits cœurs dessinés partout.
– Alors, raconte ! Comment il était ?
– Laisse tomber. Quelle horreur !
– Si moche que ça ?
– Pas le garçon de l’Opposition, idiote : la robe ! Lui, il était… comment expliquer ? Tu aimes les films d’épouvante ?
– Moi, non. Mon frère adorait ça. Surtout quand ils étaient vraiment flippants.
– Alors, il aurait aimé ça. Le garçon qui voulait m’anéantir et le garçon dont j’étais amoureuse à l’école se ressemblaient comme deux gouttes d’eau.
– Un mauvais garçon, j’imagine ! a conclu Lola.
– Peut-être qu’il était mauvais… Mais, physiquement, il n’était pas mal du tout !
Nous avons continué d’inspecter les rayons. En vain. Déçues, nous avons changé de magasin.
– Au moins, tu sais ce que tu cherches ? m’a demandé Lola.
– Oui : l’inspiration !
Je me suis emparée d’une veste en cuir rouge vif.
– Qu’est-ce que t’en penses, Loi ?
– C’est pour une soirée ou pour une corrida ?
J’ai reposé l’horreur que je tenais à la main et j’ai fixé ma meilleure amie :
– Au fait, je voulais te poser une question. Léo et toi, vous m’avez bien envoyé des ondes positives, le jour où je passais devant le Conseil, non ?
– Peut-être… Je sais plus… Pourquoi ?
Je lui ai plaqué deux bises sur chaque joue :
– Parce que je les ai reçues. Merci.
Une heure plus tard, j’avais trouvé ce que je cherchais : chaussures compensées, pantalon de treillis, mini-top… Voilà qui n’allait pas arranger ma réputation !
Le temps d’enfiler ma nouvelle tenue et de me pomponner, l’heure d’aller à la soirée est arrivée. Elle avait lieu sur la plage. Tout de suite, j’ai compris que ce serait gé-nial. Tout était extra : le décor, la musique, l’ambiance…
J’en ai profité pour m’excuser auprès de Miss et Mister Perfection, Flora et Ferdy. Je pensais qu’ils m’en voudraient à mort pour leur avoir fait rater le Prix de l’auréole. Même pas :
– Ce n’est que partie remise…, a dit Flora pour me consoler.
Incroyable ! Mais, dans le genre étonnant, il y a eu mieux. Figurez-vous qu’Ambre nous a fait un petit récital. Et là, surprise ; elle ne jouait pas de la harpe mais des percussions. Bongos, djembé, congas… Elle nous a interprété un solo qui dé-chi-rait !
Dans la famille bonnes nouvelles, vous en voulez encore ? Alors voici le fils Léo a eu son Habilitation terrestre. Il était, euh… aux anges. Et, croyez-moi, tant que vous n’avez pas vu un ange angélique aux anges, vous ne savez pas ce que c’est, quelqu’un de vraiment, vraiment heureux.
Comme les cours que Lola et moi lui avons donnés n’avaient pas été inutiles, nous avons continué nos leçons en lui inculquant les bases des techniques de DJ. En quelques minutes seulement, Léo a saisi le principe. D’un coup, il maîtrisait ses platines mieux qu’aucun scratcheur terrestre ne contrôlait ses Technics MK2. Il avait le mix dans la peau ! Lola s’est mise à danser avec frénésie. J’allais la rejoindre quand quelque chose m’a retenue.
Une voix, en fait.
Au bord de l’eau, quelqu’un m’appelait. Je me suis approchée. C’était Michael. Sans un mot (mais avec son sourire d’archange à tomber !), il s’est penché et a ramassé un coquillage magnifique qu’il m’a tendu. Je l’ai collé contre mon oreille, et j’ai entendu : – Hélix…
J’ai compris. Ça y était ! J’avais un vrai nom, mon nom d’ange. Désormais, je serais Mélanie Beeby, dite Hélix…